Restitution au Bois Fleuri

Métiers traditionnels et démarche innovante

Couturières expérimentées, professionnelles ou amatrices ; stylistes formés ou autodidactes ; tricoteuses ; brodeuses, recycleurs, artistes du Do It Yourself, nombreux sont sur la Rive Droite les femmes et les hommes en possession de savoir-faire et d'idées qui pourraient être valorisées et structurées en une filière économique organisée et pourvoyeuse d'emplois sur le territoire, que l'on soit en création d'activité ou en recherche d'un revenu complémentaire.

C'est sur la base de cette intuition qu'ATIS, La Fabrique à Initiatives et le Social/LAB/ Rive Droite se sont attelés à l'organisation d'un ensemble de concertations réunissant des habitants du territoire, des professionnel(le)s et des acteurs de l'économie locale. Le but était d'imaginer des scénarios ou des réponses entrepreneuriales adaptés aux spécificités des publics des communes de la Rive Droite, où la demande d'emplois est élevée.

Il s'agissait d'abord de vérifier la pertinence de cette hypothèse, de sonder les personnes présentes sur l'opportunité d'une telle démarche et d'imaginer ensuite des scénarios de mise en œuvre.

Ce fut l'objet de quatre rencontres échelonnées sur plusieurs mois et réparties sur les communes de Bassens, Lormont, Cenon et Floirac, au plus près des publics concernés.

Le cinquième rendez-vous fut celui du bilan et de la restitution en présence de couturières mais également d'acteurs de l'économie et de l'accompagnement à la création d'activité. Petit plus non négligeable, la démarche a eu la chance de bénéficier de la participation amicale d'Eugénie Da Rocha, fondatrice de l'association Sew & Laine (1). 


Un bilan et quatre scénarios

Si la Rive droite n'est pas un bassin historique d'emplois sur le secteur textile, il n'en demeure pas moins que de nombreux habitants possèdent des compétences susceptibles d'être valorisées. En outre, le secteur est attractif pour les jeunes gens qui sont nombreux à se destiner à la filière mode, confection et stylisme. Les réponses aux questionnaires mentionnent d'ailleurs souvent l'envie de créer « sa marque ».

D'autre part, si l'envie et les savoir-faire techniques sont bien là, il en va tout autrement des connaissances en montage de projet, création et gestion d'entreprise, qui pourtant, sont une bonne part du quotidien de l'entrepreneur. Amira Sarr, jeune co-créatrice d'une ligne de vêtements ethniques et modulables, a d'ailleurs exprimé son désir d'accompagnement dans la définition et le calibrage de son projet ainsi que dans ses recherches de fonds.

Passé l'écueil du projet et de la création, vient celui de la fabrication. Identification des éventuels fabricants, rencontres, négociations... Voilà un nouveau métier qui se profile à l'horizon du créateur, celui de responsable de production.

Selon de nombreux témoignages, l'expérience fut amère, entre fabricants peu fiables, trop chers, trop éloignés, séries trop limitées pour être rentables, etc. Du coup, le besoin se fait également sentir d'un accompagnement ou de formations dans ces domaines. A rajouter sur la liste des choses à faire.

Les rencontres ont également permis de pointer de curieux paradoxes. En effet, les métiers les plus prisés par les jeunes : styliste, créateur, designers, sont hélas les moins demandeurs de main d'oeuvre. En revanche, si la demande dans le créneau retouches et réparations se maintient, c'est l'offre qui fait défaut. Le métier, visiblement moins valorisant, attire peu les jeunes formés. A Bassens, par exemple, il ne subsiste plus qu'une seule retoucheuse en activité qui croule sous les demandes auxquelles elle ne peut répondre après le départ en retraite de ses consoeurs plus âgées.

Une participante remarque d'ailleurs qu'il lui semble important de s'assurer d'un débouché réel avant de s'engager dans une voie de formation ou de création d'activité. Truisme, certes, mais qui mérite d'être rappelé.

C'est d'ailleurs de l'ensemble de ces constats que s'est fait jour le besoin d'un chantier formation / insertion. Celui-ci aurait le mérite de permettre à de futurs professionnels d'acquérir les savoir-faire nécessaires à l'exercice de leur profession mais ouvrirait également des voies de reconversion ou de transferts de compétences vers d'autres métiers.

Fort de ces constats, ATIS propose quatre scénarios possibles :


La coopérative

Ce modèle, de plus en plus en vogue, permet de regrouper des acteurs d'un même secteur dans deux types de structures. Les Coopératives d'Activité et d'Emploi regroupent des entrepreneurs indépendant et leur offrent protection sociale et services d'accompagnement mutualisés. En outre, elles offrent aux débutants un temps de test de leur activité au sein d'un structure qui les protège.

Les collectifs de prestataires permettent un regroupement d'activités complémentaires et offrent à leurs membres une logistique, une organisation et une visibilité à d'éventuels clients qui trouvent ici une offre complète de prestations

La Cooprative


Le Coworking

Dans le cas qui nous occupe ici, celui d'un co-working textile, il s'agirait de regrouper sous le même toit – ou le même plafond - un groupe d'entrepreneurs. Les principaux intérêts des espaces de coworking sont la possibilité de mutualiser les espaces et certains matériels et de créer une dynamique entrepreneuriale faite d'entraide et d'émulation. Cela facilite également l'émergence de réponses partagées à des demandes ou des appels d'offres.

En outre, cet espace de coworking pourrait être adossé à un parcours de formation qui permettrait à tous ses acteurs de bénéficier de formations et d'accompagnement personnalisés.

Le Coworking


La création de marché

La cible est ici le client particulier à la recherche d'un service ou d'une prestation. Il s'agit de donner de la visibilité aux entrepreneurs soit au travers d'un lieu ou d'une structure créée dans ce but soit au travers d'une « market place » numérique qui offrirait aux couturières, stylistes ou retoucheuses la possibilité de présenter leur activité, leurs compétences ainsi qu'un moyen de prise de contact.

La Market Place


Le Fablab textile

Ces nouveaux lieux de fabrication et de prototypage sont en vogue. Ils permettent aux professionnels de disposer d'équipements de qualité leur permettant le prototypage ainsi que la fabrication en petites séries et aux amateurs d'accéder à ces mêmes outils et aux compétences que nécessite leur emploi. En outre, ces fablabs sont réputés d'excellents lieux de formation et de création. L'espace partagé favorisant la rencontre et l'échange.

Le FabLab textile


Et maintenant ? Et après ?

On le voit, les pistes sont ouvertes, nombreuses et enthousiasmantes. Mais les questions et les attentes demeurent sur les options à privilégier, leur pertinence dans le cadre d'une démarche d'encouragement à la création d'activité sur un territoire comme la Rive Droite. Si les acteurs en place dans nos villes constatent chaque jour la richesse des initiatives et la compétence de celles et ceux qui les portent, il n'en demeure pas mois que tous, acteurs, actrices et accompagnants, se méfient des solutions toutes faites.

Les chantiers à mener sont nombreux. Il s'agira d'abord de mieux connaître les acteurs du territoire, leurs besoins, leurs éventuelles faiblesses et les impacts que la mise en œuvre de l'un ou l'autre des scénarios auraient sur ce secteur d'activité dans le cadre de la Rive Droite.

Il s'agira également de décider ensemble des solutions à privilégier. Coop, Fablab, marketplace, coworking ? Un peu des quatre ?

Viendront alors les questions plus techniques : organisation, prix, évaluations des compétences, des partenariats et enfin le travail de modélisation économique du projet. Tout ceci en travaillant à mobiliser les savoir faire du territoire ainsi que celles qui les détiennent pour construire un projet partagé.


C'est à ce chantier que vont maintenant s'atteler ATIS, la Fabrique à Initiatives, le Social/LAB/ et celles et ceux qui ont bien voulu apporter leur voix à ces rencontres.


A suivre, donc...



(1) Sew & Laine est une structure bordelaise (bientôt béglaise...) qui promeut les usages textiles, la fabrication, le réemploi  et la création comme leviers économiques et facilitateurs du lien social. Après avoir occupé une ancienne boutique en centre ville de Bordeaux, l’asso emménagera bientôt dans un nouvel espace au sein d’un pôle industriel textile, dans le cadre d’un partenariat innovant.


Eugnie da Rocha
Eugénie Da Rocha, fondatrice de Sew & Laine, a participé à plusieurs rencontre ainsi qu'à la restitution.


On coute
On écoute...


On discute
... et on discute !

Panier de laine