Auparavant Cenon comptait de nombreux vignobles et châteaux, dont certains figuraient parmi les grands crus de Bordeaux : Château Birman,  Palmer , Cypressat, Le Loret. La culture de la vigne était même la principale activité des Cenonnais.

Un travail autour de cette thématique réalisé par un groupe d'adhérents de la Cyber Base de Cenon a permis de mettre en lumière le passé Viticole de la commune. 

Il était une fois... Des vignes à Cenon

Depuis les premiers ceps plantés par la peuplade gauloise des Bituriges, Cenon fut une commune viticole. Malheureusement au cours de la moitié du XX éme siècle, elle perdit toutes ses vignes, ce placement en liquide n’étant plus rentable. Ses vignobles ont toujours fournit un vin qui avait la « côte » et goûter aux joies de ce nectar n’était pas un délit de boisson. Dans sa robe pourpre ou argentée, les vins de la Tour Blanche du Château de Camparian etc.… ont toujours respecté l’étiquette.

Le 13 Janvier 1908, le territoire de Cenon est inclus dans la délimitation de la sous région « 1ére côte de Bordeaux ». Dès le premier classement des vins en Gironde, le vin rouge et blanc de Cenon fut rangé dans les «  Premières côtes de Bordeaux ». Il devait provenir des cépages suivants, à l’exclusion de tout autre: pour les Rouges : les Cabernets, le Carmenet, le Merlot, le Malbec et le petit Verdot et pour les Blancs : le Sémillon, le Sauvignon et la Muscadelle.

Et nos ancêtres les gaulois dans tout ça ?

D’après Pline l’Ancien (23-79), les gaulois sont bien ceux qui commencèrent à planter de la vigne au début de l’ère chrétienne. Un des premiers cépages cité, originaire d’Albanie, est la « Biturica »; d’où la vieille expression populaire « prendre une biture » lorsque l’on s'enivre.

Les Gaulois sont plus avancés que les Romains en viticulture. Ils créent de nouveaux plants et remplacent la fragile amphore par le tonneau.

Un peu d’histoire

A la fin du IIIe siècle, l’empereur Probus autorise de nouveau les Gaulois à posséder des vignes, à élaborer leur vin et à en tirer profit. Cette liberté leur avait été enlevée par Domitien. Les vignobles envahissent le territoire de Cenon, offrant un spectacle magnifique et donnant l’image d’un théâtre naturel.

La viticulture à Cenon se partage entre les côteaux et le palus de Queyries.

Après les Romains, les premiers à posséder et maintenir l’exploitation des vignobles sont les communautés ecclésiastiques. Les moines recevaient leur part de vendange au Cellier de Cenon.

Mais ce n’est que vers l’an 1200, suite à l’occupation Anglaise de l’Aquitaine, que les vignobles Cenonnais vont connaître une grande expansion.

C’est en 1307 que l’exportation des vins de Cenon et Bordeaux connaîtra un tonnage culminant qui ne sera dépassé qu’en 1893 et 1900.

Cenon devient dés le XVe siècle une commune viticole renommée jusqu’au milieu du XX e siècle. L’aristocratie Bordelaise investira dans cette commune florissante.

Ce vin Cenonnais permettait aux soldats de toute nationalité, de toute confession, de supporter les affres de la guerre; comme l’écrit le chevalier de Vivens au Cardinal Mazarin en Décembre 1649 :

« Le vin, que nos soldatz trouvent en abondance, leur fist oublier le danger ».

En 1787, l’ambassadeur américain Thomas Jefferson, futur président des Etats- Unis, crée le premier classement des vins en Gironde, dans lequel les vins de Cenon occupent une place honorable. En 1814, la commune est couverte de 96 hectares de vigne.

Les vins

Les vins produits à Cenon étaient appelés Queyries, Palus et côtes. En 1841 la surface des vignes couvrant les Queyries et le Palus est de l’ordre de « 300 journaux » soit 96 hectares et la production dépasse les 7900 hectolitres.

Les Queyries étaient des vins de première qualité avec essentiellement un seul cépage : Le Verdot, ils étaient corsés, colorés, de longue durée, fins, coulants.

Le tonneau de Queyries valait 500 à 600 Francs.

Les vins de Palus étaient tirés des nouvelles alluvions qui longeaient la Garonne.  Connus depuis le début du XVIIIe siècle, ils étaient de qualité moyenne car ils faisaient ressortir une « essence aqueuse » due au terrain alluvionnaire.

Les vins de côte étaient en général fermes et d’une belle couleur, mais quelques fois un peu dur; ce défaut passant avec l’âge. Ils servaient à corser et fortifier les vins faibles du Médoc.

Les cépages des vins de la côte de Cenon étaient le Verdot, le Malbec, le Merlot et la Vidure.

Dans  « Les nouvelles Annales des voyages et des sciences géographiques » publiées en 1838, on peut lire :

« Les vins de côte ont une qualité supérieure ; c’est de là que viennent les vins fins, les saint Emilion, les Cenon, les Grenet… Ces vins valent de 200 à 300 francs le tonneau de 912 litres. (…) Les vins réputés, vins d’entremets ou de dessert provenant des premiers crus, tels que Saint Emilion, Cenon, Pomerol ne sont mis en bouteilles qu’à 4, 5 ou 6 ans ; ils acquièrent de la perfection et peuvent durer encore une douzaine d’années. 

Les vins fins de Saint Emilion, Cenon ayant dépassé les douze ans peuvent se vendre 3 à 3,50 francs la bouteille »


Un rameau de cyprès pour acquit

Paiement du tribut du Cypressat - Edmond Louis Dupain - 1847

Un épisode historique de la ville de Cenon a été immortalisé sur une peinture à l’huile.

Ce tableau du peintre Bordelais Edmond Louis Dupain (1847-1933), réalisé en 1847, est intitulé « Paiement du tribut du Cypressat ». Longtemps accroché au mur du tribunal de Commerce de Bordeaux, il est actuellement entreposé dans la réserve du musée des Beaux Arts de Bordeaux.

Depuis l’an 1280 et jusqu’à la révolution les navires ayant chargé du vin provenant des coteaux de la rive droite ne pouvaient sortir du port qu’après s’être acquittés d’une taxe (ancien tribut seigneuriale) en échange d’une branche de Cyprès, frais coupé dans notre forêt du Cypressat. Ce droit était réglé dans le palais de l’Ombrière.

Cette toile nous apprend que l’artiste a su admirablement capter et figer à jamais cet instant désagréable du paiement du tribut.

En 1865, Cenon dépossédée de la Bastide, ne possède plus que 328 hectares de vignes et en 1908 on dénombre encore deux domaines et 29 châteaux dont 16 situés sur la colline. Cela malgré l’épidémie de phylloxéra de 1870 qui mena à la ruine certain vignerons.

Les premiers essais de traitement par des produits sulfurés se sont avérés catastrophiques, entrainant la mort des ceps. La meilleure année du vin de Cenon fut 1900, puis les vins Cenonnais seront un peu délaissés au profit des vins Médocains.

Notons que le 10 août 1973, un décret de contrôle des vins A.O.C inclut les premières côtes de Cenon.

En 1981, disparaît la dernière vigne Cenonnaise, celle de Mme Guilhem sur son terrain de 2700m² situé aux Cavailles.


Dans la  « Gironde Vinicole » on note au fur et à mesure des années les ventes de vin Cenonnais:

1896 Château Palmer sous le nom de «  Cru Palmer (M. Delbos),

1897 Château La Morlette (M. Dupuy)

1899 Château Palmer (Mme Vve Thomas)

1935 Château Lamothe (M.E. Dussaut

L’urbanisation croissante aura eu raison des vignobles Cenonnais

Sur la place du 10 Mai 1981, au bout de l’avenue René Cassagne, quelques plants de vigne et deux piliers d’entrée d’une exploitation Cenonnaise nous rappellent que Cenon fut une Cité Viticole.



Remerciements

Les adhérents et l’équipe de la cyber base remercient Monsieur Gilbert PERREZ auteur du livre « A la découverte de Cenon, son histoire, son patrimoine ». Ce document de qualité nous a permis de découvrir et d’appréhender l’histoire du patrimoine cenonnais et de son passé viticole.

L’ensemble des sources produites sont extraites de cet ouvrage avec l’accord de Monsieur Gilbert Perrez.